Dans le sillage de ses recherches sur les fermentations, ielle s’intéresse aux écosystèmes tourbeux. Les conditions uniques de ces milieux humides formés par l’accumulation de plantes mortes, telles que l’acidité de l’eau et l’absence d’oxygène, ralentissent la décomposition et contribuent à préserver naturellement les matières organiques qui y sont enterrées. Parmi les étranges découvertes faites lors de l’exploitation de tourbières à travers le monde – dont celles de corps humains quasi momifiés retrouvés sous la mousse – Simmons s’intéresse particulièrement aux réserves de « beurre de tourbière ». L’origine de la tradition consistant à enfouir des contenants de beurre au creux de la sphaigne demeure inexpliquée. L’artiste s’attarde à cette curieuse pratique, souhaitant en recréer les gestes pour perpétuer un lien immémorial avec les tourbières et renouer avec le mystère qui les habite.
À Saint-Jean-Port-Joli, Simmons profite de sa résidence printanière pour s’imprégner du lieu – regarder les herbes marines pousser, les escargots tracer des lignes dans le sable et les marées monter – et concentre son temps en atelier sur le façonnage de réceptacles en céramique destinés à être remplis de beurre. L’artiste crée des formes bulbeuses aux contours organiques, inspirées à la fois de la biologie et de la mythologie des tourbières. Ielle façonne des champignons tachetés et des plantes carnivores aux glaçures visqueuses, mais aussi des feux follets d’un vert lumineux évoquant ces étranges lueurs de marécage que le folklore interprète comme des esprits errants alors que la science les attribue à des gaz en combustion spontanée. Dans un esprit de remystification des tourbières, Simmons invoque les symboles qui ritualiseront l’enfouissement à venir de ces récipients ; suivant la lignée des légendes qui animent ces lieux hors du temps et qui, espère-t-ielle, survivront à leur exploitation minière et aux changements climatiques.
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