Hannah Todt, 2024. Crédit photo : ENE / Jean-Sébastien Veilleux photographe.

Hannah Todt

Artiste / Automne 2024

Texte-témoin

Hannah Todt est une artiste multidisciplinaire qui s’intéresse aux liens entre la performance, l’art sonore et la sculpture. À travers différentes disciplines, son travail explore le potentiel acoustique des matériaux en les réinterprétant comme des instruments de musique ; il reflète aussi la qualité esthétique et physique du son. Ainsi, Todt voit la flûte comme l’instrument le plus proche du corps : le corps humain est une caisse de résonance, et, puisque l’air y entre et sort, il peut aussi bien être une flûte.

À Est-Nord-Est, Todt prend le temps d’effectuer une recherche matérielle. Formant habituellement ses instruments avec du métal ou du bois, elle travaille l’argile pour la première fois grâce aux installations disponibles au centre. Cette exploration en céramique vient avec son lot de crainte, notamment celle que les flûtes se brisent à la cuisson ou qu’elles ne puissent laisser passer l’air. Malgré cela, la note idéale ou la perfection de l’instrument n’est pas ce qui importe à Todt en premier lieu. Ce qui l’intéresse, c’est surtout de créer des sculptures résonantes, des objets non catégorisables, un fragment de ce qui pourrait faire partie d’une performance plus large, mettant en commun plusieurs corps.

Dans ses œuvres, Todt crée des infrastructures qui permettent des moments en collectivité. À Saint-Jean-Port-Joli, elle coorganise (avec virginie fauve, auteure en résidence), un atelier au Centre-Femmes La Jardilec, où, avec un groupe de dix femmes, elles ont tenté de créer une mélodie en n’utilisant qu’une note chacune. Cette interaction de groupe fait partie d’une recherche plus large sur comment les gestes permettent de voir les choses sous une nouvelle perspective. À La Jardilec, le geste du souffle a rassemblé ces femmes dans une expérimentation commune sur l’écoute active.

C’est aussi ce qui se produit dans son studio à Est-Nord-Est : les instruments de Todt mobilisent une écoute active, certes, mais sollicitée par bien plus que l’ouïe. D’autres sens sont sollicités, notamment le toucher, ou plutôt la prise des objets pour en sentir leur matérialité. Un bâton de marche en métal, appuyé nonchalamment à la porte, invite à la randonnée. Au toucher, on réalise qu’on peut en jouer, comme d’une flûte harmonique, instrument répandu en Europe de l’Est et dans les pays scandinaves. Cela m’inspire l’idée que la vie est faite pour jouer, prendre des moments pour s’amuser, respirer, communier.

Biographie

Hannah Todt* est une artiste multidisciplinaire qui s’intéresse aux enchevêtrements entre la performance, le son et la sculpture. Lorsqu’elle explore le potentiel acoustique des objets et des matériaux dans ses performances, elle les réinterprète comme des instruments de musique. À l’inverse, avec ses sculptures, elle s’intéresse aux aspects physiques des corps résonnants. Cette approche ludique est basée sur une réflexion critique sur l’attribution de la valeur et sur la création artistique comme une marchandise ; elle rassemble, fragmente et réinterprète les récits sur lesquels sont construites les réalités afin de remettre en question leur validité et leur mutabilité. Une partie importante de sa pratique réside dans la collaboration avec des collectifs d’artistes tels que conte potuto et maria mercedes, et dans son association à des projets musicaux tels que AUTOR, Franca Sol et Gomme. Elle vit et travaille actuellement à Bruxelles et à Vienne.

*Supportée par le Austrian Cultural Forum