Lucy Andrews s’attarde au point de rencontre, puis d’effondrement, entre les systèmes naturels et humains, au passage des matières premières aux matières transformées. Elle reproduit certaines tensions qui les animent dans des œuvres formellement minimalistes qui incarnent la jonction entre nature et culture. Et c’est souvent grâce à l’architecture ou à une réflexion sur la présence des formes dans l’espace qu’elle découvre ce point de friction. Dans des œuvres antérieures, elle a généré des rapports antinomiques entre des contenants et leur contenu. Par exemple, elle a retenu un grand volume d’eau à l’intérieur d’une toile de plastique, la forme et le positionnement de celle-ci dans l’espace d’exposition recréant la tension recherchée, évitant le dégât annoncé. Ou encore elle a récupéré à l’aide d’un aspirateur la poussière laissée par les anciens occupants de son appartement et l’a enfermée dans un cube de verre, matérialisant du coup les résidus ainsi que la mémoire du lieu. Parfois, elle a aussi tenté de retourner le plastique à sa forme initiale en brûlant des objets qui en étaient composés, car toute matière plastique a été transformée, est passée de naturelle à artificielle. Ici, Andrews se questionne sur cette mutation et tente, en vain, de trouver l’instant précis où elle s’est produite.
Plus récemment, elle a entrepris de cerner et de souligner l’interstice où les écosystèmes naturels et bâtis se contaminent. En résidence à Est-Nord-Est, elle a travaillé avec les loupes de bois, ces excroissances provoquées par des parasites, des bactéries ou des maladies de l’arbre. Un excès de matière en quelque sorte, un peu comme des cicatrices. Elle a assemblé ces morceaux de bois trouvés à des palettes de transport afin qu’ils semblent ne faire qu’un, comme si les loupes émergeaient des palettes, donnant ainsi l’illusion que le bois non transformé croît à partir de son élément usiné, les plis du bois contournant l’objet comme s’il s’agissait d’un processus de développement normal. Andrews ne cherche pas à contrôler la matière comme on pourrait le croire ; elle favorise plutôt, grâce à ses manipulations, les conditions pour la laisser vivre et interagir.
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