Anne-Marie Proulx

2019
Éditeur : Est-Nord-Est, résidence d'artistes
Année : 2019
Pages : n.p.
Langue : Français / Anglais
Auteur·e : Emmanuelle Choquette

Artiste et auteur·e

Anne-Marie Proulx

La participation d’Anne-Marie Proulx à la résidence d’été en tant qu’auteure témoigne de la part intégrante que prend l’écriture dans sa pratique. Alors que ses projets se déploient dans de puissantes installations photographiques, le texte joue un rôle primordial dans leur articulation. Il est indissociable autant du processus conceptuel que de la matérialité des réalisations de l’artiste.

Lors de sa résidence, Anne-Marie Proulx s’est donné un espace-temps précis pour penser cette articulation images-mots dans un projet de livre(s). Elle s’est replongée dans l’archive photographique qu’elle a cumulée depuis le début de ses séjours en Basse-Côte-Nord, dans une communauté innue qu’elle apprend à connaître depuis quelques années, tranquillement. Oui, rien de tout cela n’est précipité. Au milieu de l’atelier, entourée de ses images, elle reconstruit le récit. Il n’est pas chronologique, il suit plutôt les directions, est, sud, ouest, nord, et puis ça recommence, ça forme un cercle. C’est par les points cardinaux qu’elle apprend à reconnaître le territoire, à travers les yeux et le corps de ses habitants.

Son écriture déborde des marges du cahier de bord, elle témoigne d’un dialogue, profondément ancré dans la rencontre, la relation humaine sincère. L’artiste travaille les traces écrites de son expérience comme une matière brute à affiner, mais pas trop. Il faut parfois garder les aspérités, les hésitations, pour révéler le véritable rythme du vécu. Des listes, des énumérations, une série de gestes qui font image, rappellent des odeurs, évoquent les éléments, esquissent un paysage, un écosystème. Dans ce flot textuel, les mots en innu font surface et reflètent avec complexité et précision une connaissance profonde de la terre. Des conversations, des répliques, des questions, des aveux. Admettre que l’on sait bien peu de choses, mais que cela n’empêche pas de s’ouvrir, d’apprendre, de ressentir, pour construire ensemble un nouvel espace à partager. Puis, lorsque le texte migrera vers le livre, les mots sur les pages, au-delà de leur fonction de témoins, deviendront exactement ce lieu.