Alors je suis tombée down in the rabbit hole, comme dans Alice au pays des merveilles, une théorie du complot après l’autre...
Alors que Jacinthe Loranger explorait le travail du plâtre coloré, des compositions photographiques et des sculptures faites d’objets trouvés et de rebuts, la pandémie est venue chambouler ses plans et ses intérêts. La montée en force des voix complotistes dans l’espace public, sur les réseaux sociaux et parfois même dans son entourage est devenue un sujet de fascination. Sorte de revers de la culture pop ludique et du kitsch assumé que l’artiste a souvent exploités dans des installations plus grandes que nature, les recherches menées à Est-Nord-Est explorent la face sombre des croyances populaires, allant de conspirations mondiales au satanisme, entrecoupées de références tragico-absurdes au Pizzagate. Le tout avec une bonne dose d’humour, puisqu’il vaut mieux en rire qu’en pleurer.
Dans l’atelier, plusieurs dessins côtoient des artefacts en céramique présentés dans une mise en scène de restaurant (pizzeria?) : pointe de pizza (fromagée ou calcinée?), vaisselle et ustensiles tachés (de sauce ou de sang?), assiettes aux motifs d’anges et de démons ornées de scènes infernales ou de sorcellerie, chandeliers en forme de pentagrammes. Tout cela trouve son pendant dans l’imagerie et le style graphique des dessins, empruntés aux enluminures médiévales, où la dichotomie du bien et du mal occupe une place centrale. Ayant pour sujet les fausses nouvelles bien de notre époque, les œuvres graphiques de Jacinthe Loranger parviennent à restituer le mélange du vrai et du faux qui soutient les croyances ésotériques et les théories du complot. Lorsque l’on s’y penche, comme l’artiste l’a fait en préparation des œuvres, l’étonnant fonctionnement interne de ce mode de pensée et l’apparence d’exactitude ou de liens logiques entre les faits exposés, présentés comme des langages codés, parviennent presque à nous convaincre. Vu comme un tout, le corpus développé ici fait sourire et donne des frissons tout à la fois, en laissant planer à peine un doute sur ce à quoi on croit, ou pourrait croire. Peut-être que c’est votre ami conspirationniste sur Facebook qui a raison, finalement... ou pas.
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