Hadar Mitz – “I came here and built a house”

2019
Éditeur : Est-Nord-Est, résidence d'artistes
Année : 2019
Pages : n.p.
Langue : Français / Anglais
Auteur·e : Anne-Marie Dubois

Artiste et auteur·e

Hadar Mitz

D’une grande sensibilité, le travail de l’artiste d’origine israélienne Hadar Mitz s’attarde à saisir l’insaisissable, sans prétention ni lyrisme. Témoignant d’un intérêt pour l’évanescence et l’inconstance de la nature qui nous entoure et irrigue le vivant, la pratique multidisciplinaire de Mitz met en parallèle l’incessant mouvement du monde et celui, plus subtil et latent de notre propre existence. Nourrie de récits mythologiques, de poésies et de folklores, son esthétique convoque ainsi des figures allégoriques d’animaux et des éléments issus de la faune et de la flore pour imaginer des univers réinvestis de beauté et de compassion hors des schèmes consuméristes et extractivistes qui caractérisent trop souvent nos rapports à l’environnement. 

Avec comme prémisse sa posture d’artiste en perpétuel déplacement autour du monde – résidences, expositions, conférences, formations, etc. –, Mitz s’est attardée dans le cadre de son séjour à Est-Nord-Est à la notion de cycle et aux concepts de mouvement et de rythme qui lui sont associés. Dans son atelier, une charpente de maison en bois, immense et sobre tout à la fois, sur laquelle ont été tirés des draps blancs constitue la pièce maîtresse de cette petite exposition improvisée. Projetée sur cette structure devenue écran, une vidéo montre en boucle les images en noir et blanc d’une harde d’oiseaux captée par l’artiste sur les berges du fleuve Saint-Laurent. Leurs piaillements mélancoliques baignent l’atelier, lequel emprunte autant à la maison du chasseur qu’au cabinet de curiosités leur caractère bucolique et étrange. Autour et à l’intérieur de l’installation, d’autres motifs habitent l’espace de leur présence fantomatique et dédoublée : chien Cerbère, chauves-souris et astre solaire se décomposant selon différentes rythmiques et mises en scène rappelant la chronophotographie ou le diorama emblématique du musée d’histoire naturelle. Figées dans le temps par la main de l’artiste, ces bribes de nature se laissent saisir furtivement, rappelant par leur statisme feint l’impossibilité de freiner leur migration continuelle vers d’autres états, d’autres devenirs.

Ce sont ces tensions entre mouvement et inertie, vitalité et mort, nature et culture qui irriguent en amont comme en aval la pensée et les œuvres de cette artiste. Elle-même sujet nomade, Hadar Mitz mobilise notre attention pour mettre en lumière, l’espace d’un moment, la place que nous occupons dans un monde en constante mutation.