J’avais avec moi la clé, la clé qui ouvre toutes les portes…
Dans sa pratique installative et relationnelle qui se déploie autant en photographies qu’en vidéos, en sculptures et en performances, Giorgia Volpe laisse transparaître un esprit libre, nomade, intuitif et ouvert. Grâce à son approche collaborative, on l’imagine généreuse et facile d’approche, le genre de personne à qui on laisserait volontiers la clé d’un motel à l’abandon sur le bord de la route 132.
La clé qui ouvre toutes les portes : c’est la jolie formule résumant l’accès illimité que Giorgia a obtenu à un motel avec vue sur le fleuve pour y poursuivre un travail in situ (on se doute qu’elle ne l’a pas demandé, qu’on le lui a plutôt offert au détour d’une conversation). De là s’est construit un ensemble d’images fixes ou en mouvement, révélant des interactions poétiques entre des figurant·e·s et les espaces environnants. Les citoyen·ne·s et passant·e·s·se sont prêté·e·s au jeu de construire avec l’artiste des images mystérieuses, à mi-chemin entre la documentation d’actions performatives et la mise en scène de fictions inspirées par l’histoire du motel, par son aménagement et son mobilier. Les photographies et les vidéos, marquées par la beauté et parfois l’incongruité du paysage, le passage du temps et le hasard des rencontres, ont aussi pris place sur la grève, grâce à un usage ludique de constructions textiles à porter. Pensées comme des peaux « extérieures », à la fois vêtements et représentations fantasmées d’autres corps, ces œuvres enfilées en solo, mais plus souvent à plusieurs, créent de nouvelles formes, engagent de nouveaux rapports au corps, suscitent parfois l’étonnement ou le dépaysement, ou encore forcent les rapprochements et le contact humain.
L’articulation entre le dedans et le dehors est un axe de recherche cher à l’artiste, qui se manifeste ici de multiples manières. D’abord dans le choix des lieux : les abords du fleuve, mais aussi les espaces intérieurs du motel; les couloirs d’Est-Nord-Est, mais aussi les murs extérieurs d’une grange avoisinante; l’atelier de l’artiste, mais aussi un grand drap tendu à l’extérieur en guise d’écran de projection. Surtout, on comprendra qu’une réflexion sur l’intériorité/extériorité se développe dans le rapport à l’autre, dans les moments de rencontre qui nourrissent la production et font prendre un chemin différent de celui qu’on aurait soi-même choisi. La clé qui ouvre toutes les portes, c’est peut-être celle qui ouvre jusqu’aux portes que l’on ne pouvait imaginer.
La pratique de Giorgia Volpe s’exprime dans un ensemble d’expérimentations polymorphes qui s’étendent du dessin à l’installation, de la photographie à la vidéo, du geste aux interventions et actions à caractère social ou intimiste. L’artiste s’intéresse aux réalités et frontières du corps ainsi qu’aux relations de celui-ci avec l’environnement et les lieux de passage (de l’intérieur à l’extérieur, de l’individuel au collectif, de l’intime au public, du réel à l’imaginaire, de la nature à la culture). Giorgia Volpe a participé à de nombreuses expositions, interventions publiques et résidences d’artistes. Ses œuvres ont été exposées, entre autres, au Musée national des beaux-arts du Québec, au Musée d’art contemporain de São Paulo (Brésil), au Centre d’art et de culture de Bangkok (Thaïlande), à la Biennale de Lyon (volet Résonance), à la biennale Contextile (Portugal), à la Biennale internationale d’art contemporain textile – WTA de Madrid, au Centre d’art contemporain Xiang Xishi (Chine) et à Passage Insolite à Philadelphie.
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