La peintre argentine Camila Carella a longtemps été captivée par la forte emprise que les images peuvent exercer – leur capacité à submerger ou à réprimer, à susciter des sensations extatiques, voire à transcender la réalité. Guidée par son intérêt profond envers la mythologie et les religions, particulièrement le tantrisme, elle réalise des œuvres qui présentent des compositions ornementales incrustées de symboles. Rappelant les retables ou les reliquaires, et infusées d’une énergie irréelle et mystique, elles inspirent à la fois l’adoration et la curiosité. Tout en étant fascinée par l’essence d’un autre monde encapsulée dans ces objets et ces symboles, Carella demeure septique quant à leur capacité à évoquer des sentiments de dévotion et de vénération.
Les peintures de Carella proviennent souvent de visions qui se manifestent dans ses rêves. Durant sa résidence à Est-Nord-Est, l’une de ses œuvres à pris forme à partir d’une image saisissante qu’elle a vue en songe – une fontaine de laquelle jaillit une eau rouge. Construite telle une mosaïque où chacune des tesselles est méticuleusement reproduite, la fontaine avec ses jets cramoisis occupe le centre de l’œuvre. Des corps mordus par des créatures canines gisent au sol à proximité de la fontaine. Disposées autour de la scène, des vignettes carrées illustrent la douleur ou le lien : des nœuds, des maillons de chaîne, des interactions entre agresseurs et victimes, des êtres humains et non humains, elles sont souvent explicitement violentes ou sexuelles. La composition dans son ensemble traduit l’ambiance irrationnelle et troublante d’un cauchemar.
Des illustrations de mains et de motifs entrelacés sont récurrentes dans d’autres œuvres créées par Carella en résidence. Dans une pièce, elle reproduit la surface d’un vitrail derrière laquelle elle illustre deux mains tenant leurs avant-bras d’une manière protectrice, une série d’étoiles jaunes à huit branches les encadre. La nature de la main repliée demeure ambiguë, elle vacille entre un soutien offert ou une contrainte physique, entre domination et soumission.
Dans son travail, Camila Carella examine la foi, le mysticisme et les traditions du passé à partir d’un point de vue perspectiviste, animiste et fantastique. En utilisant la peinture afin de concilier et d’organiser l’espace, elle cherche à problématiser l’expérience mystique interne et les images de dévotion qui la représente. Dans ses œuvres qui sont composées comme des surfaces oniriques et imaginaires ou dans ses installations qui occupent une pièce entière, les perceptions spatiales sont un moyen de construire des scènes qui sont en corrélation avec la spiritualité anthropocentrique contemporaine.
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